Rock & Coach est une série d’articles dont le thème est inspiré par une chanson prise au hasard de ma playlist. Ils ont pour vocation d’être une source d’inspiration pour celles et ceux qui se posent des questions et d’initier le dialogue avec ceux qui proposent des réponses.
Dreamer du mythique album Crime of the Century de Supertramp. La quintessence du son « Roger Hodgson » en quelques notes reconnaissables dès les premières mesures.
Le saut spatio-temporel est immédiat et replonge dans ces années où les “hippies” interpellaient les capitalistes et réciproquement, qui ne sont pas sans rappeler les oppositions actuelles entre défenseurs du climat et, presque les mêmes, capitalistes.
Effet Miroir
… tandis que, très éloigné de ces préoccupations, enfant, je me rêvais dans un monde où mes Lego®, mes petites voitures et mes figurines cohabitaient en pleine harmonie et bienveillance. « Le monde des bisounours » comme disait celui qui venait shooter dans mes constructions en courant pour échapper à l’inévitable bagarre qui s’ensuivrait.
Je perçois cette chanson comme un dialogue, intérieur probablement, entre un « rêveur » et son « censeur ». « Tu n’es rien d’autre qu’un [stupide] rêveur » s’oppose à « Eh bien, je peux être qui je veux et faire ce que je veux » comme l’expression d’une nième répétition de l’antagonisme entre les « costauds » et les « têtes d’ampoule ».
Et au moment d’écrire cet article, ce conflit intérieur se répète et… me voilà figé dans l’hésitation.
La plus grande calamité s’abattra sur l’humanité, le jour où les rêveurs disparaîtront
– Nietzche
Hésitation
J’hésite entre une construction « classique » qui vous parlerait de la notion de valeurs d’utilité et désirabilité sociales indispensables clés à maîtriser pour accompagner un client à préparer des entretiens d’embauche.
J’hésite à vous parler des bilans de personnalités qui permettent de se situer et de comprendre les comportements des autres, de les accepter et d’en faire une force.
J’hésite à faire référence à Christophe Dejours qui affirme que l’innovation naît de l’adaptation des acteurs face à un travail non réalisable tel qu’il est prescrit. En « inventant » une solution hors norme, ils innovent mais ne peuvent en parler puisqu’ils « désobéissent ».
J’hésite, enfin, à laisser vagabonder mon esprit, et, au hasard des méandres, faire des liens inusuels entre des notions apparemment distantes, liens d’où surgiront des idées novatrices (au moins pour moi).
Hésiter entre « faire » en étant dans le concret et l’utile et « penser » en prenant le temps de l’inaction au risque de ne rien « produire » de tangible.
Le Dualisme – Matériel vs Spirituel
J’imagine que nos ancêtres préhistoriques devaient déjà sévèrement discuter autour du feu quand le chasseur ramenait de la viande au shaman qui, scrutant les étoiles, se demandait d’où nous venions et ce qu’il y avait après la mort. L’opposition entre celui qui va au front prendre des risques et celui qui reste au chaud et travaille avec son front est-elle éternelle ?
Et finalement qui nous dit qu’ils étaient deux ? N’est-ce finalement pas notre vision productiviste du monde qui le résume à ceux qui « font » d’un côté et ceux qui « rêvent » de l’autre ?
Dans l’imaginaire commun, d’ailleurs, le faiseur est représenté comme un costaud : guerrier porteur d’armure, forgeron aux muscles saillants, ouvrier à la chaîne, cadre dynamique en costume, …
Le rêveur se figure de plus faible constitution et isolé de la « vraie » vie : magicien dans sa tour, moine retiré dans sa cellule, informaticien noctambule, agent de fonction support, …
Le Dualisme résume l’opposition entre le spirituel et le matériel, hérité de Platon, Aristote et Descartes qui placent l’esprit « au-dessus » du corps. Maslow enfonce le clou avec sa pyramide des besoins et indique qu’il n’est possible de se préoccuper des besoins spirituels qu’après avoir satisfait à ses besoins physiologiques.
Illustration « de quand j’étais petit », l’émission « La tête et les jambes ». Un candidat se voyait poser des questions et quand il ne trouvait pas la réponse, un sportif de haut niveau le repêchait en réussissant une épreuve dont la difficulté augmentait à chaque erreur.
C’est la déviation par rapport à la norme qui est le moteur du changement. C’est une source d’innovation mais aussi d’inconfort pour la personne
–Christophe DEJOURS
Et maintenant ? On fait quoi de tout ça ?
Une pensée glanée lors de ce court vagabondage m’a titillée. L’hésitation paralysante dans laquelle me plonge cette chanson est-elle symptomatique d’une plus large question ? Pour quoi ? En deux mots, « pour » « quoi », quel est l’objectif que je souhaite atteindre ?
Depuis notre enfance, nous sommes habitués à ce que tout apprentissage soit sanctionné par une note qui, suivant nos drivers, atteste de nos efforts, de notre perfection ou de notre appartenance par exemple.
La pensée sans “livrable” tangible est donc une notion qui nous est étrangère, voire incongrue. Si nous ne sommes pas en mesure de [re]produire quelque chose à partir de ce que l’on nous a enseigné, la bulle ! L’objectif des « contrôles » est sûrement plus pour classer les élèves que pour vérifier les acquis. Pourrions-nous imaginer un « contrôle » de ce type ? :
- Prof : « Tu as bien compris ce que je viens de t’enseigner ? Tu as d’autres questions ? »
- Elève : « Oui – A part ce point où j’aimerais avoir une explication… ».
- Prof : « Très bien ! D’ailleurs ta question me prouve bien que c’est clair pour toi ! Je valide cet acquis. »
- Elève : « Merci, à la semaine prochaine… »
Utopiste me direz-vous ?! Et pourtant !
Dans la vie professionnelle, ce qui est recherché c’est d’améliorer l’autonomie des collaborateurs. Cela passe aussi par la capacité à poser autant de questions que nécessaires pour s’assurer que les objectifs sont compris et partagés avant de commencer à produire.
J’ai accompagné en coaching une jeune diplômée qui n’arrivait pas à trouver sa place. Pointue dans un domaine innovant pour son entreprise, elle alternait des exposés brillants et fédérateurs et des échecs cuisants quand il fallait passer à la mise en œuvre. Elle s’est rendu compte qu’elle cherchait à avoir « de bonnes notes » lors des exposés et elle excellait dans ce domaine. Sur le terrain, plus de bonnes notes qui tiennent, il faut du concret !
Quelques légers réglages lui ont permis d’améliorer sa posture, de s’ouvrir au dialogue et au partage des objectifs et de trouver des solutions co-construites. Elle a obtenu rapidement l’adhésion dont elle avait besoin.
En conclusion « méta », cette chanson me renvoie aussi à mon inquiétude de coach, quand je doute de “l’efficacité” de mon accompagnement.
Et un « conseil » pour les managers, songez à la force de votre équipe, quand votre « chasseur » et votre « shaman » s’entendent pour mettre en production efficace des idées géniales ?
Invitation au partage
Nous voici arrivés à destination de ce rapide parcours introspectif inspiré d’une chanson.
Vous vous sentez une âme de rêveur incompris ?
Vous ne comprenez pas à pourquoi on peut perdre autant de temps à réfléchir ?
J’aimerais recevoir vos témoignages, contactez-moi.
Je vous invite à partager ces voyages réflexifs et aimerait recevoir vos inspirations en retour.
Christophe Laurent
Coach, Ingénieur, Manager, Dirigeant de PME et pas que...
Constructeur dans l'âme, j'aime avant tout faire naître les collaborations entre les créateurs et les réalisateurs pour que les projets voient jour.
En 2020, je fonde Première Pierre Développement conjuguant ainsi ma passion entrepreneuriale et le désir de partager et transmettre.
Christophe Laurent
Coach, Ingénieur, Manager, Dirigeant de PME et pas que...
Constructeur dans l'âme, j'aime avant tout faire naître les collaborations entre les créateurs et les réalisateurs pour que les projets voient jour.
En 2020, je fonde Première Pierre Développement conjuguant ainsi ma passion entrepreneuriale et le désir de partager et transmettre.